Un Moulin pas comme les autres
A visiter absolument à quelques kilomètres de Chaumont, de l’Abbaye de Clairvaux et de Colombey-les-deux-Eglises, en périphérie du village d’Orges : Le Moulin de la Fleuristerie, un atelier qui fabrique des pistils, des pétales, des feuilles et des fruits artificiels pour la Haute Couture, Chanel notamment, pour les costumiers du Moulin Rouge et du Théâtre Royal du Danemark, pour des ateliers de création en France, en Italie, aux Etats-Unis et au Japon.
Un lieu étonnant qui fonctionne toujours avec une roue à aube et d’impressionnantes machines qui datent de la fin du 19ème siècle, en parfait état de marche !
De la farine aux fleurs artificielles
L’histoire du Moulin est étroitement liée aux évolutions économiques et sociales du pays : il a été tour à tour un Moulin à farine au Moyen Age, puis une huilerie et un foulon à draps (foulage, c’est-à-dire battage de la laine tissée pour l’assouplir), puis une forge au 19ème siècle, toujours au rythme de l’infatigable roue à aube.
Au début du 20 ème siècle, les fleurs artificielles ornent les corsages de toutes les coquettes et Paris compte alors près de 4000 ateliers qui emploient chacun 10 personnes. C’est dans ce contexte qu’en 1903, une entreprise parisienne s’installe au Moulin d’Orges pour y fabriquer des bouquets à la mode et y faire travailler 40 employées … la main-d’oeuve en province coûte moins cher que dans la capitale !
Pour la petite histoire, les vaillantes travailleuses du Moulin étaient hébergées sur place et constituaient un charmant vivier de jeunes-filles à marier, courtisées par les jeunes gens du village …
Une roue à aube écologique
La roue à aube est depuis toujours une véritable centrale électrique écologique : la force libérée par la chute d’eau, la source résurgente du Dhuys, sur la turbine, permet d’entraîner la génératrice qui produit l’énergie électrique. Elle fournit actuellement suffisamment d’électricité à 110 volts pour les activités de la bâtisse, l’excédent de production est vendu à EDF qui en fait bénéficier le village.
Evidemment on ne trouve plus dans le commerce d’ampoules compatibles avec les 110 volts, aussi les propriétaires du Moulin ont-ils lancé un appel dans la région pour en récupérer et la récolte a dépassé leurs espoirs, le stock constitué leur permettra de s’éclairer encore longtemps.
Les façades du Moulin, la toiture, la roue, les mécanismes d’entraînement des machines, la turbine, sont classés Monuments Historique depuis 2012.
Un avoir-faire ancestral labellisé
Depuis 115 ans, la fabrication florale se fait dans les même conditions matérielles : mêmes métiers à guiper qui recouvrent les fils de fer en laiton avec du coton, pour les tiges, mêmes outils pour gaufrer les tissus, mêmes presses, mêmes très beaux outils variés parfaitement intacts … et heureusement parce qu’ils ne sont malheureusement plus fabriqués.
Les produits utilisés au Moulin sont parfaitement naturels. Pour colorer feuilles, fruits, tiges et pistils, il est nécessaire de procéder à 6, 7, 8, 9 trempages à la main dans des colorants alimentaires, d’autres ingrédients, comme la fécule de pomme-de-terre et la gomme arabique sont aussi bien utiles dans la réalisation de toutes ces belles choses.
Rien n’est assemblé sur place, tous les éléments fabriqués ici sont réunis en petites bottes avant d’être livrés dans des lieux prestigieux où ils s’épanouiront en splendides bouquets de luxe.
Aujourd’hui, le métier est devenu un métier d’art, unique et rare. Le Moulin de la Fleuristerie qui ne fonctionne plus qu’avec une personne et demie en atelier, est le seul en France à travailler pour la création de luxe. La production en masse et de qualité plus modeste se fait dans des pays où la main-d’œuvre est moins coûteuse … l’histoire se répète étrangement !
Depuis 2008, l’entreprise est labellisée « Entreprise du patrimoine vivant » et son activité est inscrite sur la liste de l’Institut des Métiers Rares.
Activités festives et touristiques
Emmanuel Geoffroy qui est originaire d’Orges et Annette son épouse, deux anciens chefs de projets dans l’industrie, ont repris la Direction du Moulin de la Fleuristerie en 1994 qu'ils ont réhabilité. Ils se partagent les tâches, Annette, qui a suivi une formation pour la fabrication des fleurs artificielles, travaille aux ateliers. Dès 1997, ils ouvrent le Moulin aux visiteurs, qui depuis en a accueilli plus de 110000. Ils proposent la découverte guidée des lieux, ateliers, boutique et salle d’exposition des produits dérivés sur le thème de la fleur,
et même un atelier pédagogique de fabrication d’une boutonnière florale … très sympathique !
Par ailleurs, en 2007, ils ont entièrement restauré l’ancienne Halle du temps de forges pour en faire une vaste salle de réception et d’exposition qu’il est possible de louer pour toutes sortes de manifestations et festivités. Un gîte et 3 chambres d’hôtes,
ainsi qu’un programme de randonnées et d’éco-tourisme autour du Massif du Grand Murin dans le cadre du futur Parc National des forêts de Champagne et Bourgogne, complètent une offre qui séduira les amoureux des savoir-faire d’antan et d'environnement préservé.
Pour plus d'informations : le site du Moulin